Douance et TSA
Le trouble du spectre de l’autisme (TSA) est un trouble neurodéveloppemental qui se manifeste par un déficit des habiletés sociales et de la communication, de même que par un ensemble de comportements et d’intérêts stéréotypés. Ces symptômes sont présents dès les premières années de vie, mais peuvent ne devenir pleinement manifestes que plus tard, lorsque les demandes sociales excèdent les capacités de l’individu. Ils peuvent aussi être masqués par des stratégies apprises. Pour que le diagnostic de TSA soit retenu, les symptômes doivent occasionner une perturbation du fonctionnement quotidien et ne pas être mieux expliqués par une autre condition.
Chez les enfants, plusieurs caractéristiques associées à la douance sont similaires à celles du TSA. Les capacités verbales et mnésiques supérieures ainsi que la présence d’intérêts suscitant une « hyper » focalisation attentionnelle sont des signes communs entre le TSA et la douance. De même, les jeunes doués, tout comme ceux avec un TSA, recherchent la stimulation, et peuvent rencontrent des difficultés à se conformer à ce qui est attendu des adultes, se montrer têtus et être perfectionnistes. Ils ont un sens de l’humour particulier et sont très préoccupés par la justice et l’équité. Toutefois, bien qu’ils puissent paraître très similaires, l’origine et les motivations qui sous-tendent ces comportements sont fondamentalement différentes.
De plus, il existe des manifestations qui sont spécifiques au TSA et qui ne se rencontrent pas typiquement dans la douance. Notamment, la personne avec un TSA s’exprime parfois avec un langage plus formel, voire pédant, que la plupart des personnes issues du même milieu ou du même âge. Elle peut avoir une compréhension littérale, c’est-à-dire prendre les choses au pied de la lettre, et de la difficulté à saisir les doubles sens, l’ironie et le sarcasme. À l’inverse, lorsqu’une personne douée s’engage dans une conversation, elle démontre généralement de la réciprocité et de bonnes capacités de compréhension, y compris pour les sous-entendus. Chez les doués, il n’y aurait pas d’adhérence à des routines rigides, ni de comportements répétitifs en général. Enfin, les doués ne présentent pas de déficits marqués pour comprendre leur vécu intérieur ou encore pour identifier les désirs, les émotions et les intentions des autres.
Chez certaines personnes, la douance coexiste avec un TSA. Parmi les personnes avec un TSA, 3% auraient également une douance intellectuelle. Ils représentent néanmoins une proportion non négligeable des enfants, adolescents et adultes qui consultent en neuropsychologie. En effet, bien que la douance soit une force, la présence d’un trouble neurodéveloppemental tel que le TSA génère des difficultés significatives. Il faut savoir qu’il n’est pas chose facile de diagnostiquer la 2E douance, celle présente en compagnie d'un TSA. En effet, étant donné leur potentiel intellectuel élevé, ce n’est souvent que plus tardivement dans le développement que les demandes sociales excèdent les capacités des personnes douées. La présence de caractéristiques spécifiques au TSA et n’étant pas uniquement expliqués par le chevauchement des manifestations entre la douance et le TSA pourrait permettre de dépister la 2e.
Bien que le nombre d’études sur la 2e douance-TSA demeure faible, l’examen de la littérature montre une tendance à la hausse des publications scientifiques s’intéressant à ce sujet entre 1998 et 2020.
Certains auteurs notent que la douance intellectuelle atténue la sévérité des traits autistiques. En effet, un niveau intellectuel élevé pourrait notamment permettre de développer des mécanismes de compensation pour parvenir à inférer les états mentaux des autres et à adopter un comportement socialement approprié. Les symptômes autistiques seraient donc particulièrement difficiles à observer dans une situation d’évaluation standardisée chez une personne douée. Il y a donc un risque de passer sous le radar pour les jeunes et les adultes 2E. Bien qu’ils soient capables de masquer leurs traits autistiques dans une évaluation standardisée, comme dans plusieurs situations structurées, les symptômes autistiques des 2E apparaîtraient plutôt dans des situations informelles et moins structurées. Ainsi, un jeune 2E pourrait être tout à fait adéquat dans un jeu de société avec des règles claires, mais ne pas savoir comment interagir avec les cousins dans une fête de famille. Dans le cas d’un adulte, on pourrait penser à un enseignant de mathématique très compétent, mais qui serait excessivement mal à l’aise et maladroit dans un 5 à 7 avec ses collègues.
En fait, les personnes avec un TSA et une douance intellectuelle rencontreraient, malgré leur QI élevé, des difficultés majeures sur le plan interpersonnel. D’ailleurs, on noterait une diminution significative du fonctionnement adaptatif avec l’âge chez les jeunes ayant une douance et un TSA. L’adolescence, ainsi que le début de l’âge adulte, seraient des périodes critiques pour l’aggravation des déficits associés au TSA chez ces personnes en raison de l’augmentation de la complexité des demandes sociales. Intuitivement, on pourrait penser qu’un quotient intellectuel supérieur soit un facteur protecteur en présence de TSA, mais ce serait plutôt l’inverse. Les adolescents et les adultes avec une 2E seraient ainsi particulièrement vulnérables à l’anxiété et à la dépression, puisqu’ils parviendraient difficilement à rencontrer les demandes sociales de leur environnement.
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